Un céréalier heureux

Le Courrier de l’Ouest a rencontré un agriculteur heureux…
Le Courrier de l’Ouest présentait mardi 4 août ce céréalier, membre de la FNSEA, qui se disait très heureux de faire son métier en se revendiquant de manière parfaitement assumée, participant actif d’une agriculture industrielle dont la vocation serait bien de nourrir le monde et d’exporter. Par là même, celui-ci s’employait à démontrer toute l’incongruité des critiques que ne cessent de proférer les écologistes à l’encontre de ces agriculteurs modernes et performants dont il s’estime membre à part entière. A en croire ce professionnel exploitant, les critiques de ces écologistes (car bien entendu, ce ne sont que des écologistes qui critiquent) vis-à-vis notamment de certains produits phytosanitaires ne seraient pas fondées et encourageraient l’utilisation d’autres produits tout aussi nocifs, voire plus.
Nourrir le monde, vraiment ?
L’agriculture industrielle devrait effectivement nourrir le monde entier, pourtant, elle ne le fait pas ! Hilal Elver, rapporteur spécial sur le droit à l’alimentation auprès des Nations Unies, constate qu’aujourd’hui, au niveau mondial, on produit de la nourriture pour plus de douze milliards de gens, soit plus de 170% de ce qui est nécessaire. Malgré tout, selon Jean Ziegler, 30 millions de personnes meurent de faim chaque année dans le monde. Non seulement cette agriculture industrielle ne remplit pas son rôle premier en raison de son système totalement dépendant des lois du marché qui se moque parfaitement de la faim dans le monde, mais en plus, elle exerce un impact violent sur les sols, les écosystèmes, le climat, l’ensemble du vivant, les petits paysans dans le monde, consomme une quantité d’énergie beaucoup trop élevée et présente de sérieux risques sanitaires pour l’homme.
Le véritable enjeu pour la protection du vivant
Si un combat semble prioritaire, c’est bien celui-ci. Obtenir un changement total de paradigme en privilégiant les petites fermes, les ceintures de maraîchage autour des grandes villes, les productions locales et bio et en remettant totalement en cause le mythe d’une agriculture performante, productiviste et exportatrice fortement soutenue par des subventions importantes et totalement dépendante des multinationales de l’industrie chimique ainsi que des grosses coopératives plus proches de multinationales dans leur fonctionnement que de l’esprit coopérateur issu de leur vocation fondatrice qui consistait logiquement à protéger l’agriculture familiale. Une véritable révolution agricole s’avère indispensable et toutes les forces associatives environnementales devraient en faire leur principal objectif. Ce combat doit inclure aussi le devenir des milieux boisés soumis aujourd’hui à des traitements de plus en plus intensifs au prétexte de la transition énergétique.
Le monde des exploitants agricoles touche à sa fin, vive les paysans !
Selon les propres données de la FAO (Organisation pour l’alimentation et l’agriculture des Nations Unies), parmi le milliard de personnes qui ne mangent pas à leur faim, plus de 70% d’entre elles sont des petits paysans qui sont, pour beaucoup d’entre eux, empêchés de produire. Redonnons des terres à ces petits paysans, permettons leur de produire en paix et une bonne partie du problème trouvera déjà un début de solution. Tout le monde le sait : l’agriculture industrielle est une agriculture du passé. Son avenir est condamné, mais nul ne sait dans combien de temps. Ce sera très probablement aux consommateurs, citoyens et au monde paysan de précipiter sa chute.
Pierre Grillet

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